Animal Death – Chloë Taylor sur nos obligations envers les animaux morts

Un excellent article de Chloë Taylor, « Respect of the (animal) dead », vient de paraître dans le collectif Animal Death (dirigé par J. Johnston et F. Probyn-Rapsey, Sydney University Press, 2013).

La conception dominante dans le monde occidental est déontologique dans le cas des cadavres humains et utilitariste pour les cadavres des autres animaux.

Nous pensons qu’il est respectueux envers les animaux d’utiliser toutes les parties de leur corps (leur chair, leurs muscles, leur sang, leurs os, etc.), alors qu’il est irrespectueux d’instrumentaliser les corps humains – particulièrement pour la nourriture.

Les cadavres huAnimal Deathmains requièrent le respect et des rituels. Les cadavres des autres animaux requièrent l’instrumentalisation la plus complète possible – « afin qu’ils ne soient pas morts pour rien », comme on dit (oubliant que ce sont souvent nous qui les avons tués dans le but précis d’utiliser leurs restes à des fins diverses).

Taylor souligne que peu de choses ont été écrites en ce qui concerne nos obligations envers les morts en éthique animale. Clare Palmer en discute, mais considère que, les torts étant toujours actuels, nous faisons mieux de dépenser notre énergie à respecter et protéger les vivants plutôt que les morts.

Le problème, souligne Taylor, est que rendre la mort des autres animaux « ungrievable » a pour effet de rendre leur vie moins réelle : « being ungrievable in death means that one’s life will not be recognised as a life ».

Reconnaître la mort d’un animal comme une mort digne d’un deuil, c’est la reconnaître sa vie comme une vie, une existence singulière à jamais irremplaçable.

Dans la situation actuelle, le deuil est strictement réservé pour les vies humains et faire un deuil des autres animaux est considéré comme un enfantillage, à la limite du pathologique.

  • Contrairement à ceux travaillant en éthique animale qui considèrent que faire le deuil d’un animal est une perte de temps dans le contexte actuel où il y a tant d’animaux qui souffrent et meurent sans nécessité, Chloë Taylor soutient de façon convaincante que la façon dont nous traitons les morts a une incidence directe sur notre façon de traiter les vivants.

– L’article est accessible au complet sur Google books.

– Plus d’infos sur le recueil : http://purl.library.usyd.edu.au/sup/9781743320235

Published by

Christiane

Coordonatrice du Centre de justice sociale de l'Université Concordia (Montréal) - Coordinator Social Justice Centre (Concordia University, Montreal)

2 thoughts on “Animal Death – Chloë Taylor sur nos obligations envers les animaux morts”

  1. Merci pour ce très bel article. C’est J. Safran Foer je crois, qui dit dans son livre “Eating animals” que nous traitons les animaux vivants comme s’ils étaient déjà morts. Cela rejoint le propos de l’article : c’est bien parce que nous ne respectons pas leur mort que nous méprisons aussi leur vie…

  2. Je n’ai pas réussi à accéder à l’article de Chloé Taylor => commentaire sans intérêt basé uniquement sur ce que tu en dis.
    « Contrairement à ceux travaillant en éthique animale qui considèrent que faire le deuil d’un animal est une perte de temps » me semble introduire une position inutilement conflictuelle avec ce qui serait une vision dominante. Faire le deuil de qui que ce soit est probablement une perte de temps. Cependant, sachant que ça ne correspond pas à un choix mais à un sentiment qu’on a du mal à s’empêcher d’éprouver, ça ne nous avance pas beaucoup de faire ce constat. Je ne vois pas où serait cette tendance dominante chez les animalistes qui voudraient spécifiquement dévaloriser le sentiment de deuil quand il porte sur un non-humain. Au contraire, on lit souvent des personnes qui expriment leur désarroi de n’avoir aucune possibilité socialement reconnue de s’absenter de leur travail pour assister un compagnon animal en fin de vie, ou mal vivre le fait qu’elles ne rencontrent pas la même compréhension pour leur peine dans leur entourage quand elles ont perdu un animal que quand il s’agit d’un proche humain.
    Par ailleurs, la peine ressentie suite au décès d’une personne animale ou humaine (le deuil) est une question différente de celle du traitement de son cadavre. Sur le second point (et sous réserve bien entendu que le mort ne soit pas devenu cadavre suite à un meurtre destiné à utiliser son corps), peut être que la sagesse serait non pas d’aligner le traitement des cadavres animaux sur celui des humains mais plutôt de permettre « l’instrumentalisation la plus complète » dans les deux cas (sans la rendre obligatoire : libre aux proches d’opter dans les deux cas pour des rituels s’ils y trouvent une consolation). Si l’on comprend que les morts sont morts, on comprend qu’on ne leur fait pas plaisir en leur offrant des fleurs ou des stèles, qu’il n’y a aucune façon ni de leur procurer de la joie ou de la peine, ni de communiquer avec eux. Ils ne sont pas des gens qui ont acquis une propriété supplémentaire : « être morts ». Il n’y a personne. L’expression « ils ne sont plus » rend bien compte de la situation. Même si psychologiquement nous avons du mal à le croire, ils ne sont pas leur cadavre. À partir de là, faire de l’engrais avec les cadavres, les donner à découper à des étudiants en médecine, ou les offrir à des charognards et prédateurs n’a rien d’irrespectueux, c’est juste faire en sorte qu’un matériau inerte serve à satisfaire les besoins d’êtres vivants. En fait, rien n’empêche de combiner cela avec du rituel :http://www.spi0n.com/sky-burial-vautours-cadavres-tibet/

Leave a Reply to shambalahCancel reply